
Bienvenue sur la cinquante-quatrième édition
des jeudis Natura 2000 Garonne en Occitanie
....
La Grande Alose
La Grande alose est un poisson amphihalin, qui a la capacité de vivre alternativement entre l’eau douce et l’eau salée. Espèce emblématique de la Garonne et classée Natura 2000, venez la découvrir dans cette 54ème édition des « Jeudi N2000 ».
Reconnaître l'espèce
La Grande alose appartient à la famille des Clupéidés qui regroupe des poissons marins comme la sardine ou le hareng. Son corps en forme de fuseau est comprimé latéralement et son profil dorsal fortement incurvé. La tête typique est haute, large et latéralement comprimée.
Elle présente une large tache noire, juste derrière les branchies, parfois suivie d’une ou plusieurs autres taches plus petites. La couleur du dos est d’un bleu profond tournant sur le vert tandis que les flancs et le ventre sont d’un blanc argenté (Illustration ci-dessous). La nageoire caudale est très fourchue et symétrique et est soutenue par une série de petits os.
Il n’existe pas de réel différence sexuelle si ce n’est une plus grande taille des femelles par rapport aux mâles à âge égal. La taille moyenne de la grande alose adulte des fleuves français est de 52 cm pour un poids moyen de 1 kg 460 ; elle peut atteindre 80 cm (5 kg) (Portugal, Maroc)
Une aire de répartition en régression
L’alose est un poisson amphihalin, c’est-à-dire, capable de vivre en alternance en eau douce où elle se reproduit et en mer où elle assure la plus grande partie de sa croissance. Une libre circulation entre ces deux pôles est indispensable à l’accomplissement de son cycle biologique. Historiquement cette espèce était présente de la Norvège jusqu’au Maroc, mais son aire de répartition actuelle s’est restreinte aux côtes atlantiques françaises, espagnoles et portugaises.
Carte emprise population (Source : RNN Frayère d'Alose)
Plus spécifiquement sur la Garonne, les grandes aloses trouvent des zones de frayères favorables et se reproduisent en aval de Golfech, du fait d’obstacles sur le cours d’eau empêchant la remontée plus en amont (jusqu’à Toulouse). Chaque année, le stock reproducteur de la Garonne est évalué grâce au suivi de la reproduction naturelle effectué en aval de Golfech, porté par MIGADO.
Carte de localisation (source : MIGADO)
Les adultes remontent, de février à juin, dans les fleuves pour venir se reproduire dans les cours moyens et amont (jusqu’à plus de 650 km de la mer). Ils sont âgés de trois à six ans. Les femelles, plus âgées et plus grosses que les mâles en raison d’une maturation sexuelle plus tardive (cinq ans contre quatre ans), ont une fécondité élevée (100 à 250 000 ovules par kg). Les géniteurs meurent après la reproduction.
Le débit et la température de l’eau jouent un rôle essentiel dans la reproduction de la Grande alose. Le débit optimal pour l’activité de ponte de l’espèce se situe entre 150 et 450 m3/s. Sur le même principe, la température optimale de l’eau se trouve entre 12°C et 24°C. Les aloses fraient entre mai et mi-juillet sur des sites typiques caractérisés par une plage de substrat grossier délimitée en amont par une fosse et en aval par une zone peu profonde à courant rapide avec une qualité d’eau convenable. L’activité de ponte se déroule de nuit selon une succession de séquences comportementales très caractéristiques avec l’émission d’un bruit particulier qui constitue le phénomène de « bull » (Illustration ci-dessous).
(Source : RNN Frayère d'Alose)
Les œufs de très petite taille (1 à 2 mm) tombent sur le fond en se logeant dans les interstices du substrat. Le temps d’incubation est très court (quatre à huit jours) mais la température doit être supérieure à 17°C. Après éclosion, les larves restent localisées sur le fond à proximité de la frayère. Au bout de 15 à 20 jours, les alosons qui mesurent plus de 20 mm se déplacent activement sur le fond ou en pleine eau. La dévalaison vers la mer a lieu en été et en automne de l’année de naissance et dure de trois à six mois.
En 2024, environ 530 grandes aloses sont venues se reproduire sur la Garonne. Cette valeur est la plus faible jamais observée sur le fleuve. C’est aussi le cas à l’échelle du bassin avec un total de 3 380 individus estimés (530 en Garonne et 2850 en Dordogne)
Partie menaces/ extinction
Les Clupéidés sont largement exploités par les pêcheries commerciales et constituent une très importante ressource économique mondiale. En 1995, les captures étaient de 10,7 millions de tonnes soit près de 10 % du total débarqué par toutes les pêcheries continentales et maritimes y compris l’aquaculture (données FAO).
Dès le début du XIXème siècle et au cours du XXème, l’aire de répartition de la grande alose s’est fortement rétrécie. Les causes en sont d’origine anthropique :
- construction de barrages (non ou mal aménagés) qui a limité l’accès des adultes à certains bassins et complètement fermé l’accès à d’autres ;
- recalibrage et reprofilage des cours d’eau ;
- extractions de granulats qui ont fortement dégradé les zones de reproduction et les zones de grossissement des juvéniles ;
- mortalité à la dévalaison des alosons au niveau des centrales hydroélectriques et nucléaire ;
- qualité de l’eau.
- prédation du silure
Actuellement, la grande alose est considérée comme une espèce vulnérable au niveau européen et français.
La Réserve naturelle nationale de la frayère d'Alose en cours d'extension !
Le déclin rapide des populations d’alose sur le bassin de la Garonne dans les années 1970, il a été décidé de classer en réserve naturelle l’un des derniers sites de reproduction de l’espèce situé en Lot et-Garonne (47). Portée par la Fédération de pêche 47 (FDAAPPMA 47) et la Société pour l’étude, la protection et l’aménagement de la nature en Lot-et-Garonne (SEPANLOG), la Réserve Naturelle Nationale de la Frayère d’Alose (RNFA) a officiellement été fondée le 13 mai 1981 (2,3 km de long et 48 hectares), entre les communes d’Agen et du Passage d’Agen.
Localisation RNN (Source : Réserves naturelles)
Au-delà de la création de la réserve, plusieurs autres initiatives ont été mises en place et qui ont permis un rebond de la population jusque dans les années 1990 :
-
équipement des barrages,
-
arrêt des extractions de granulats en lit mineur, etc.
-
introduction d’alosons d’élevage provenant d’une pisciculture
Cependant, cela n’a pas suffi et la population s’est effondrée dans les années 2000.Le comité de gestion des poissons migrateur (COGEPOMI) a porté un moratoire en 2008 ayant entrainé l’interdiction de la pêche de la grande alose sur le bassin Gironde-Garonne-Dordogne (reconduit annuellement).
Malgré l’ensemble de ces actions, la population de grande alose continue de chuter sur ce bassin et l’espèce est aujourd’hui est classée en danger critique d’extinction par l’UICN depuis 2019.
Depuis de nombreuses années, le seuil de Beauregard qui était un élément de fragmentation de la continuité écologique, se désagrège progressivement, ouvrant des brèches dans la structure. Cela permet aux grandes aloses de coloniser des sites de pontes, plus en amont de la RNN, jusqu’à Golfech (voir sites « noyaux durs » ci-dessous). Cependant, l’emprise actuelle de la RNN ne correspond plus à la réalité du terrain et un projet d’extension de la réserve est en cours. Cela permettra de protéger et suivre au mieux les sites de pontes et de croissance des alosons.
Futures extensions envisagées de la RNN (Source : RNN Frayère d'Alose)
Testez vos connaissances grâce à un quiz interactif !
Pour aller plus loin :